samedi 12 septembre 2020 Il y a: 3 années
Categorie: Dossier de presse
« La menace de mort contre une personne morale n’existe pas »
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Article Dna
Un agriculteur de Boesenbiesen, dans le Bas-Rhin, à qui on avait saisi son tracteur, est venu bruyamment signifier son désaccord devant les grilles de la sous-préfecture de Sélestat, mardi. Il était jugé ce vendredi à Colmar pour menaces de mort, rébellion et outrage.
Un agriculteur de Boesenbiesen, dans le Bas-Rhin, a comparu ce vendredi devant le tribunal correctionnel de Colmar en procédure de comparution immédiate pour des faits de menaces de mort, de rébellion et d’outrage. Les policiers de Sélestat avaient été alertés le 8 septembre qu’un individu s’était présenté devant les grilles de la sous-préfecture. Il s’était montré agressif avec la secrétaire qui avait tenté d’entamer le dialogue avec lui et avait violemment secoué le portail. Au secrétaire général qui était venu à sa rencontre, il avait menacé « d’aller chercher son fusil pour le buter ».
Les policiers qui sont arrivés chez lui, le lendemain, pour procéder à une perquisition afin de trouver l’arme qui avait été mentionnée la veille, se sont retrouvés face à un homme récalcitrant qui refusait de les suivre et a résisté au menottage. « Il a fallu quatre fonctionnaires de police et l’usage du pistolet à impulsion électrique à trois reprises pour vous maîtriser ! », a rappelé la présidente du tribunal. Selon les policiers, l’homme de 63 ans les aurait outragés en alsacien, ce qu’il nie. « Ils ont inventé ça pour me punir… »
Sentiment de persécution institutionnelle
Jamais condamné par la justice, l’agriculteur travaille seul dans son exploitation qui compte une dizaine de vaches et génisses. Il cultive également du maïs, du blé et de l’orge. Il explique que sa colère est consécutive à la saisie d’un tracteur d’une valeur de 80 000 €, « son outil de travail », a souligné son avocat, Me Uriel Lipsyc. « En décembre dernier, avec ma banque, nous avions procédé à un virement de 6 000 € et proposé un échéancier. La société de financement n’a pas réagi et le tracteur a été saisi. »
La représentante du ministère public Marianne Aventin a dit comprendre que la saisie, « justifiée ou non » du tracteur, ait pu causer de l’émoi chez le prévenu, ce qui ne justifie cependant pas les menaces de mort. « De l’émoi ? », s’est exclamé Me Lipsyc, « c’est peu dire ! » L’avocat a insisté sur la situation précaire du prévenu, « endetté au point que son outil de travail lui a été confisqué ». « En effet, il nourrit un sentiment de persécution institutionnelle », a-t-il ajouté, reprenant un terme employé par le parquet. Et exhumé un témoignage du secrétaire général de la sous-préfecture qui n’avait pas été évoqué durant l’audience : « Je ne me suis pas senti personnellement visé par les menaces de mort, je pense qu’il visait plutôt l’institution… » « À ma connaissance, la menace de mort contre une personne morale n’existe pas, l’infraction n’est donc pas constituée, c’est pourquoi vous allez relaxer mon client », a conclu l’avocat.
L’agriculteur a été condamné à deux mois de prison intégralement assortis du sursis simple.